Si Madame de Maintenon fut l’épouse du roi Soleil, Madame de Montespan fut sa maîtresse, la mère de ses enfants naturels, mais n’accéda jamais à la reconnaissance suprême. Retour sur le destin de la favorite du Louis XIV.
Une enfance aristocratique
Françoise Athénaïs de Rochechouart de Mortemart voit le jour en 1640 dans le château familial à Lussac-les-Chateaux. Son père, Gabriel de Rochechouart de Mortemart est un gentilhomme de la chambre du roi (équivalent de la garde rapprochée) sa mère, l’une des dames d’honneur de la reine Anne d’Autriche. A l’âge de douze ans, elle intègre le pensionnat de l’abbaye aux Dames à Saintes où elle va recevoir, avec une petite poignée de condisciples, la meilleure éducation alors réservée à la haute noblesse. Elle en sortira en 1658 sous le nom de Mademoiselle Tonnay- Charente et gagnera la cour de France pour servir la belle-sœur de Louis XIV, Henriette d’Angleterre mais également Monsieur, le frère du roi. Sa beauté et son intelligence vont lui ouvrir bien des portes.
Un mariage noble
En ce début d’année 1663, elle épouse Louis Henri de Pardaillan de Gondrin, marquis de Montespan en l’église Saint Sulpice à Paris. Installée, elle va fréquenter les plus beaux salons littéraires du Paris du 17e siècle où son à-propos et son sens de la répartie font des merveilles. Son mari va connaître un revers de fortune et le couple est contraint de se retirer dans un modeste logement ce qui ne l’empêche pas de déambuler à la cour, puisque devenue dame de compagnie de la reine, Marie Thérèse d’Autriche. Plus tard, elle va devenir une confidente de la favorite de Louis XIV, Louise de Vallière, ce qui va lui permettre de croiser le roi à de multiples occasions. Ce dernier ne prêt tout d’abord pas attention à cette femme de l’entourage de sa maîtresse, mais peu à peu, et parce qu’il se lasse aussi de la duchesse de la Vallière, il va s’éprendre de cette femme à la beauté et à l’esprit renversants. En 1667, elle devient la maîtresse du monarque : ce sera le commencement d’un règne sans partage dans la vie sentimentale du souverain.
Un arrangement amoureux
Alors que le roi s’éprend davantage de Madame de Montespan pour en faire sa favorite, le mari de cette dernière ne l’entend nullement de cette oreille et va même jusqu’à qualifier le roi de « canaille ». Naturellement, ce dernier ne peut laisser prospérer un tel comportement et le marquis de Montespan est rapidement sommé de quitter la cour pour s’exiler sur ses terres. Malgré les largesses que le souverain est prêt à accorder à son vassal, celui-ci est fou de rage et n’admet pas que sa femme puisse le tromper. Quoi qu’il en soit de ses sentiments, Madame de Montespan est installée dans des appartements contigus à celui du roi qui n’hésite pas lui rendre fréquemment visite. D’abord préservée du scandale, la reine ne s’aperçoit pas immédiatement de la situation qu’elle ne pourra toutefois méconnaître éternellement. Ensemble, Madame de Montespan et le roi Soleil auront sept enfants qu’il reconnaîtra et dont Madame de Maintenon aura la charge de prendre soin, ce qu’elle fera avec la plus grande attention. Pour éviter un scandale de l’époux exilé de Madame de Montespan, il est indiqué sur l’acte en reconnaissance que les enfants sont légitimés, le nom de la mère y est omis. Louise de la Vallière quant à elle, ne cède pas facilement sa place et entendant se battre un minimum malgré la douceur de son être et sa timidité légendaire. Si un temps elle a tenté de s’exiler dans un couvent à l’abri des regards pour y laisser libre cours à son chagrin, le roi la retient à la cour pour des raisons politiques et c’est avec beaucoup de dignité que l’ancienne favorite va encaisser les rebuffades et autres humiliations. Il lui aura fallu attendre jusqu’en 1674, pour que son exil au couvent des Carmélites lui soit accordé. Elle quitte la cour de France non sans avoir accompli un geste d’une grande élégance : elle va demander pardon à la reine et partir dignement.
Un caractère bien trempé
Madame de Montespan, devenue la favorite du roi Louis XIV, si elle sait se présenter sous le meilleur des jours avec son royal amant, possède un caractère bien difficile et est très loin de faire l’unanimité. Ainsi, redoutant une disgrâce, elle écarte sans ménagement les jeunes filles de l’entourage du roi et de la cour, même si son esprit et sa beauté demeurent stupéfiants, le temps passe et elle est loin d’être stupide. Bien plus, son pouvoir devient politique et il est souvent d’usage de passer par elle pour atteindre sa majesté, qui lui prête une désinvolture dont elle est parfaitement exsangue. Plus que tout, Madame de Montespan est une femme de son temps qui, outre son amour pour les belles lettres (La Fontaine ou Molière ne sont-ils pas ses protégés ?) aime les belles choses. Ainsi, les murs de ses appartements sont recouverts de tableaux exquis, ses lectures sont de qualité et elle côtoie les érudits de son temps dans les salons littéraires où son esprit affûté fait le bonheur des convives.
La disgrâce
Le temps passant, les grossesses se multipliant à l’instar des scandales auxquels elle est associée, le roi qui vieillit a désormais plus besoin de calme dans l’intimité de ses appartements que du tumulte, oh combien réjouissant, que lui a apporté cette femme joyeuse et dynamique. Mais ce qui aura finalement raison de sa royale histoire d’amour se nomme : Mademoiselle de Fontanges. Car oui, le roi va tomber éperdument amoureux de cette femme de 17 ans, protégée de Madame de Montespan, qui se retrouve rapidement enceinte du roi Soleil, mais l’enfant ne survivra pas et elle va s’éteindre progressivement jour après jour, pour atteindre le repos éternel. C’est précisément à cette époque que Madame de Montespan se retrouve mêlée à une sordide histoire d’empoisonnements, connue sous le nom de l’affaire des Poisons. Contrainte de quitter le château de Versailles, Madame de Montespan se retire progressivement pour se consacrer à ses enfants qui feront tous de « beaux » mariages. En 1691, elle se retire définitivement dans l’abbaye de Fontevraud alors dirigée par sa sœur Maire-Madeleine et meurt le 27 mai 1707.
Madame de Montespan a sans nul doute était une femme à l’influence remarquable dans la vie de Louis XIV. Aurait-il été aussi solaire sans cette femme de goût auprès de lui ? Quoi qu’il en soit, l’histoire personnelle de Madame de Montespan fait intégralement partie de la grande Histoire de France.
En résumé :
- Une favorite royale à l’ascension fulgurante : Issue de la haute noblesse, Madame de Montespan se distingue à la cour par son esprit brillant, sa beauté et son éducation d’élite. Elle devient en 1667 la maîtresse officielle de Louis XIV, amorçant un destin exceptionnel parmi les femmes influentes à Versailles.
- Une femme de goût et de lettres : Grande protectrice des arts, elle fréquente les salons littéraires du XVIIe siècle et soutient Molière et La Fontaine. Son goût pour les belles choses et sa culture font d’elle une figure essentielle de la vie culturelle sous Louis XIV.
- Une courtisane influente mais controversée : Dotée d’un caractère affirmé, elle devient un véritable canal de pouvoir politique à la cour. Mais ses intrigues, sa jalousie et son implication supposée dans l’affaire des Poisons alimentent les critiques et précipitent sa disgrâce royale.
- Une histoire d’amour royale bouleversée : Avec Louis XIV, elle a sept enfants, tous reconnus et confiés à Madame de Maintenon. Malgré une relation passionnée, elle perd peu à peu sa place auprès du roi, notamment à cause de la jeune Mlle de Fontanges et du scandale politique qui l’éclabousse.
- Un retrait digne d’une grande dame : Écartée du pouvoir, Madame de Montespan se retire dans l’abbaye de Fontevraud en 1691 et y meurt en 1707. Son destin unique incarne la cour fastueuse et cruelle de Louis XIV, et son nom reste lié à l’Histoire de France et de Versailles.