
Le décor enchanteur de l’Egypte, ses légendes, ses pyramides, ses pharaons, dont la seule évocation apparait comme une promesse de voyage, d’aventure, en dahabieh ou en dos de chameau, le long du Nil. Mais cela serait duper le lecteur si la description s’arrêtait ici, car tellement éloigné de la réalité, mais pour son plus grand plaisir.
Des personnages haut en couleur, tellement attachants
L’héroïne de cette histoire est Amelia Peabody, femme de son temps (fin du 19e), vivant dans l’Angleterre victorienne, non mariée à 32 ans (et se figure finir vieille fille) lorsque son père décède, père duquel elle était très proche. Elle partageait avec lui, qui avait été un universitaire dans une plus lointaine époque, son intérêt pour les langues anciennes et mortes ainsi que pour les civilisations antiques, non sans talent par ailleurs. Cette solide instruction va contribuer à faire d’Amélia une femme libre, indépendante (elle sera la seule héritière de son père, ses six frères jouissant au décès de ce dernier, de situations tout à fait confortables, elle touchera près d’un demi-million de livres). Désormais affranchie de la nécessité pécuniaire, elle décide de voyager afin d’acquérir de nouvelles compétences ou à tout le moins, de mettre en pratique celles qu’elle possède déjà. Dotée d’un sens pratique et d’une répartie hors du commun, Amélia ne va pas s’en laisser conter, et c’est tout naturellement, que lors d’une halte italienne, qu’elle prendra sous son aile une jeune compatriote en la personne de la délicate Evelyne, qui, tourmentée par un « vilain » passé, se retrouve au banc de la bonne société britannique. Amélia décide alors de faire de la jeune femme sa dame de compagnie au pays des pyramides, destination de notre chère héroïne. L’histoire aurait pu s’arrêter là, et narrer les aventures de deux femmes libres, voyageant seules au milieu des oasis et du sable. Naturellement, il n’en est rien. Amélia et Evelyne vont faire la connaissance des frères Radcliffe (dans des conditions que le lecteur aura tout le plaisir d’apprécier), archéologues respectés, dont l’aîné, Emerson ne conçoit nullement l’utilité des convenances, et encore moins la nécessité de la conversation à moins que celle-ci soit totalement indispensable aux fouilles ou aux recherches, requérant son attention. Walter, le cadet de la fratrie, est un jeune homme plus « civilisé », au caractère moins tempétueux que son aîné, s’épanouit sans nul doute, dans l’échange et ses recherches archéologiques. C’est donc sous le ciel limpide égyptien, que nos quatre protagonistes vont se retrouver mêlés à de bien sombres histoires, mêlant intrigues, superstition et enquête policière.

Elizabeth Peters, égyptologue et écrivain de talent
L’auteur a fait le choix, parfaitement délectable pour le lecteur, de décrire les aventures et les émotions d’Amélia Peabody par le prisme d’un journal intime, écrit à la première personne du singulier, ce qui confère à l’histoire, outre les exactitudes des lieux ou encore des méthodes d’excavations, une immersion totale de celui-ci dans les différents lieux mythiques égyptiens. Le lecteur est ainsi plongé dans les réalisations des fouilles effectuées au sein même des pyramides, mais également, une immersion totale dans l’enquête. Car il s’agit bien, sans nul conteste, d’un livre d’enquête. L’écriture d’Elizabeth Peters est fluide, précise, concise. La maîtrise du sujet est parfaite, et je dois ici faire l’aveu, que c’est grâce à cette auteure, que je me suis littéralement piquée d’égyptologie, tant les descriptions des lieux, des personnages, des musées y sont extraordinaires. De plus, l’auteure agrémente son récit de situations vécues, mêlant personnages de fiction et archéologues existants tout au long de son exposé, et j’aime à croire qu’il s’agit là de l’exposé romancé d’une savante, car Elizabeth Peters est titulaire d’un doctorat en égyptologie, et a sillonné les sites antiques, tel que celui d’Abou Simbel. Elle participa également à l’élaboration de plusieurs manuels universitaires, faisant référence sur le sujet. Reste à savoir si Amélia Peabody, intrépide archéologue, figurait dans ceux-ci ?
Une lecture brillante, délectable et érudit, à lire sous un plaid, une tasse de thé à la main, en prenant la précaution de laisser la lumière allumée, car le crime a été commis, reste à trouver à qui il profite.
Editions « Le livre de poche », tome 1 regroupant les deux premiers volets de la saga Amélia Peabody, 2022.
En résumé
- Un décor captivant en Égypte antique : une aventure immersive sous le ciel égyptien, entre pyramides, légendes, et mystères historiques, propices au rêve et à l’évasion.
- Amélia Peabody : une héroïne féministe et moderne : ce personnage plein d’audace, doté d’intelligence et d’indépendance, incarne un modèle féminin libre dans un monde régi par les conventions victoriennes.
- Une intrigue alliant enquête policière et archéologie : mélange unique de fiction historique, d’intrigues criminelles et de fouilles archéologiques, ce roman est un régal pour les amateurs de mystères érudits.
- Elizabeth Peters : une auteure passionnée d’égyptologie : l’écriture précise et immersive, portée par une expertise remarquable, plonge le lecteur dans l’Égypte du 19ᵉ siècle avec réalisme et passion.
- Un classique de la littérature historique à redécouvrir : publié par « Le Livre de Poche », ce tome introductif est parfait pour explorer la saga Amélia Peabody, mélange brillant de culture, d’aventure et de suspense.